a-
Première étape
Cheikh Bouamama
ne déclara la lutte contre le colonialisme français, dans la
région du sud oranais qu'après avoir préparé toutes les
tribus sahariennes par le biais des disciples de la
confrérie répartis à travers la région notamment les tribus
des Trafi, des Rézaynia , d'El ahrar, Frenda et Tiaret.
Cette propagande trouva un large écho auprès des tribus de
Ammour, Hamiane et Chaamba. En un laps de temps très court,
Cheikh Bouamama avait réussi à rassembler environ deux mille
trois cents soldats entre cavaliers et fantassins. Le
premier affrontement militaire entre Cheikh Bouamama et les
troupes françaises eut lieu le 27 Avril 1881 au lieu dit
Sfisifa au sud de Aïn Sefra, et s'acheva par la défaite de
l'armée française et la mort au champ d'honneur de certains
hommes de Cheikh Bouamama parmi lesquels le chef des Maâlif
et le chef des Rézaynia.
Compte tenu de la
gravité de la situation, les autorités françaises
s'empressèrent d'envoyer des renforts supplémentaires vers
la région afin de réprimer la révolte et la liquider. Les
renforts envoyés à la région étaient composés de
:
-
Deux bataillons dirigés par le caïd Kaddour ould
Adda
-
Le bataillon de Tiaret dirigé par El Hadj Kaddour al
Sahraoui
-
Une caravane de deux mille cinq cents chameliers
accompagnés de six cents algériens.
Ces troupes étaient
commandées par le Général Colineau D'Annecy, commandant du
secteur militaire de Mascara.
Le deuxième
affrontement militaire entre Algériens et Français eut lieu
le 19 mai 1881 au lieu dit El Mouilek, situé près de Ksar
Chellala dans les monts Ksours. Il y eut de violents combats
dont Cheikh Bouamama sortit victorieux malgré la supériorité
de l’ennemi sur le plan matériel et humain.
Selon les rapports des
Français eux-mêmes, cette bataille a occasionné des pertes
pour les deux parties, celles des Français étant estimées à
soixante tués et vingt deux blessés.
Après cette
bataille, Cheikh Bouamama demeura maître de la
situation. Il se dirigea vers Labiod Sidi Cheikh ; ce
qui aida les insurgés au cours de cette période à couper les
fils du télégraphe reliant Frenda à El Bayadh et à attaquer
les centres de la société franco-algérienne des alliés,
tuant de nombreux employés espagnols de cette société, ce
qui amena les autorités françaises à prendre certaines
mesures pour protéger leurs intérêts, notamment en
rassemblant quatre colonnes fortes aux points
suivants :
-
La compagnie de Ras El Ma confiée au Colonel
Janine
-
La compagnie Békhither sous le commandement du
colonel Zouini
-
La compagnie de Tiaret confiée au Colonel
Brounoussiart
-
La compagnie d’El Bayadh dirigée par le colonel
Tadieu puis par le colonel Négrier
Afin de faire
face aux victoires répétées enregistrées par Cheikh
Bouamama, les autorités françaises engagèrent des mouvements
rapides consistant à envoyer ses troupes vers le sud ouest
en vue d’encercler l’insurrection et la liquider, pour
ensuite se propager dans la région et étendre son influence
sur tous les ksours de l’ouest oranais.
Le colonel Négrier fut
chargé de punir les tribus ayant participé à l’insurrection
avec Cheikh Bouamama et il commença par raser le mausolée de
Sidi Cheikh situé à El Bayadh Sidi Cheikh. Cela fut suivi
par les massacres terribles commis par l’armée d’occupation
à l’encontre des populations isolées des plaines et collines
dans la région d’El Bayadh, pour se venger de leur
participation à l’insurrection. Les mêmes crimes furent
commis à l’encontre es populations de Chellala dahrania
(située à l’ouest). A Labiod Sidi Cheikh, des actes
horribles furent commis par le bourreau Négrier le 15 août
1881 qui fit bombarder le mausolée de Sidi Cheikh et profana
sa tombe, ce qui constitue une véritable atteinte aux
valeurs spirituelles du peuple algérien et à ses us et
coutumes.
Entre septembre et
octobre 1881, les troupes françaises commandées par le
général Coligneau et le général Louis furent attaquées par
les moudjahidine près de Aïn Sefra et il y eut plusieurs
tués et blessés de part et d’autre.
Par ailleurs, le
général Louis fit détruire les deux ksours que
possédait Cheikh Bouamama, à savoir le ksar supérieur de
Meghrar et le ksar inférieur de Meghrar . De même
que fut détruite la zaouia de Cheikh Bouamama et que furent
tués bon nombre d’habitants isolés.
Parmi les faits
notables intervenus au cours de cette période, il y eut le
ralliement de Cheikh Si Slimane Benhamza, chef des Ouled
Sidi Cheikh el ghraba (ceux de l’ouest) à la révolte de
Bouamama, à la tête de trois cents cavaliers. Il se dirigea
avec ses troupes vers le nord ouest de Ain Sefra et de là
vers la région des Bekakra afin de faire pression sur les
tribus inféodées au colonialisme français.
Compte tenu de
l’accroissement numérique des troupes coloniales auxquelles
des renforts affluaient de toutes les régions, la pression
s’accrut sur Cheikh Bouamama qui fut contraint de se retirer
en direction de la région de Figuig au Maroc, où son
activité diminua et ses partisans se dispersèrent.
Certains parmi eux
rejoignirent Si Kaddour Benhamza , chef des Ouled Sidi
Cheikh chraga (ceux de l’est), tandis que d’autres
rejoignirent les rangs de Cheikh Si Slimane Benhamza , chef
des Ouled Sidi Cheikh el ghraba (ceux de l’ouest) ; le
reste des combattants s’établit à Figuig et ses environs.
Le 16 Avril 1882, les
troupes d’occupation pourchassèrent Cheikh Bouamama sur le
sol marocain mais il réagit par une attaque violente sur le
chott de Tighri qui occasionna à l’ennemi des pertes
humaines considérables, le contraignant à se replier.
Cette défaite eut un
impact considérable dans les milieux militaires français et
accrut la ténacité et la résistance des insurgés, démontrant
ainsi une fois de plus leur supériorité sur les troupes
françaises.
b-
Deuxième
étape
Au cours de cette étape
, la résistance de Cheikh Bouamama fut caractérisée par un
calme relatif après qu’il se fut établi dans son village
natal, el Hammam el fougani, à Figuig où il était
arrivé en juillet 1883, afin d’entreprendre la
réorganisation de ses troupes pour l’avenir.
Inquiètes de cette
activité intense, les autorités coloniales s’empressèrent
d’adresser un télégramme signé par le Général Soucié, chef
du 19ème bataillon, au gouvernement de Paris,
l’appelant à exercer des pressions sur le Sultan du Maroc
afin qu’il chasse Cheikh Bouamama du territoire marocain car
il constitue un danger pour les intérêts de la France dans
la région.
Ceci amena Cheik
Bouamama à quitter la région vers la fin de l’année 1883
pour se réfugier dans le Touat et demander la protection des
habitants de l’oasis de Deldoul. Il y demeura jusqu’à 1894
et fonda une zaouia où il entreprit de dispenser un
enseignement religieux afin de poursuivre son combat et
stopper l’expansion coloniale dans le sud ouest. Il adressa
des messages à l’ensemble des chefs des tribus sahariennes,
notamment les touaregs qui lui proposèrent de venir
s’installer chez eux afin de pouvoir s’entraider dans la
lutte contre l’ennemi français. D’autre part, certaines
tribus installées aux frontières algéro-marocaines
l’appuyèrent et se rallièrent à lui.
Le colonialisme
français tenta d’étouffer la révolte de toutes parts et par
tous les moyens et de s’étendre dans le sud et ce, à travers
la mise en place d’établissements économiques et la création
de centres commerciaux dans le territoire du Touat et de
Tadikalt.
c-
Troisième
étape
Cette étape
constitue le début de la fin car en plein cœur des
évènements, Cheikh Bouamama avait réussi à rallier de
nombreux partisans et gagner la confiance des populations
des régions sahariennes. Cela amena les autorités coloniales
à tenter de le rallier à leur cause par tous les moyens. Des
contacts furent entrepris par le biais de la Délégation
Française à Tanger en 1892 afin de négocier avec lui la
question de l’aman (la paix négociée) qui ne déboucha
sur aucun résultat.
Les rapports d’amitié
qui existaient entre Cheikh Bouamama et les autorités
marocaines suscitèrent l’inquiétude des autorités coloniales
françaises, notamment après qu’il fut reconnu comme chef des
tribus des Ouled Sidi Cheikh ayant sous son autorité toutes
les régions sahariennes. Elles tentèrent une nouvelle fois
de gagner son amitié afin de faciliter leurs tentatives
d’expansion et d’étendre leur influence sur les régions
sahariennes. Pour cela, le gouverneur général Laverrière
décida le 16 octobre 1899 d’accorder l’aman total
sans conditions.
Au début du vingtième
siècle, Cheikh Bouamama entra au Maroc et s’installa dans la
région d’Oujda, ce qui permit aux autorités coloniales en
Algérie de se féliciter d’avoir pu se débarrasser de l’un de
ses ennemis les plus acharnés à les combattre.
Le
combat mené par Cheikh Bouamama durant de nombreuses années
avait considérablement entravé l’expansion coloniale dans
l’extrême sud, en particulier le côté occidental et ce
malgré le blocus important que les autorités coloniales sous
la direction du Général Lyautey avaient tenté d’imposer à la
résistance