L'insurrection des Aurès débuta
effectivement le 11 novembre 1916 lorsque les populations de Aïn Touta et Barika
se rassemblèrent au village de Boumazaz et s'accordèrent à déclarer la guerre
sainte aux impies. Cette nouvelle se propagea rapidement dans les villages et
des centaines d'hommes répondirent à l'appel sacré. Ceci poussa les Français à
couper toutes les communications entre la région et le monde extérieur en
interdisant les déplacements et les voyages de et vers les Aurès.
Les insurgés réagirent en détruisant les
câbles du téléphone, du télégraphe et les ponts. Par ailleurs, ils attaquèrent
les domiciles et les biens des Européens, visant particulièrement les agents de
l'administration coloniale dans tous les villages et hameaux.
Les opérations des résistants contre les
intérêts français s'intensifièrent, touchant le fort administratif
"Mac
Mahon", ce qui se solda par la mort du
sous-préfet de Batna et la destruction du fort après que la garde militaire
française se fut enfuie en l'abandonnant.
Tandis que l'administration coloniale
sous-estimait ces événements, les insurgés entreprirent d'encercler la ville de
Barika le 13 novembre 1916 pour attaquer un convoi français le lendemain.
Devant l'aggravation de la situation et
l'extension de l'insurrection, le gouverneur général d'Algérie demanda des
renforts militaires supplémentaires, en insistant sur la nécessité de recourir à
l'aviation pour terroriser les populations, notamment après que 10 soldats
français furent tués lors des accrochages du 5 décembre 1916 lorsque les troupes
françaises avaient attaqué les rebelles qui s'étaient réfugiés dans les monts
Mesmataoua.
A cet effet, la France retira le bataillon
250 du front en Europe pour l'envoyer en Algérie, le nombre de soldats français
dans les Aurès ayant atteint ainsi 6000 hommes commandés par le général
"Monnier". Le commandement militaire fit venir les avions de guerre du
type de ceux qui étaient en Tunisie pour les envoyer vers la région des
Aurès.
Au début de Janvier 1917, on dénombrait
plus de 14000 soldats basés dans les Aurès, équipés d'armes des plus modernes en
vue de liquider définitivement l'insurrection et réprimer ses
animateurs.
Entre novembre 1916 et la fin du mois de
mai 1917, les troupes coloniales ont commis les pires crimes contre les
populations désarmées en représailles contre la poursuite de la résistance. La
preuve la plus édifiante de ce qui fut commis par les Français durant cette
période est le rapport établi par la commission parlementaire française qui
s'est penchée sur la politique pratiquée par les Français, basée sur les
assassinats par toutes sortes d'armes, la terre brûlée et la saisie des biens
des populations. Ne se contentant pas de cela, la France emprisonna plus de 2904
révoltés, accusés de rébellion et de provocation de troubles. 825 Algériens
furent présentés devant les tribunaux et 805 d'entre eux furent condamnés à
environ 715 ans de prison au total tandis que 165 furent dirigés vers les
tribunaux arabes à Constantine et 45 vers le tribunal de Batna qui prononça à
leur encontre 70 ans de prison.
Les condamnés furent soumis à des amendes
totalisant 706656 francs français et l'administration coloniale saisit environ
3759 fusils de chasse anciens, 7.929 ovins, 4511 caprins et 266 bovins.
Compte tenu de la gravité de la situation,
le gouvernement français s'empressa de placer l'ensemble de la région sous
administration militaire aux termes du décret du 22/11/1916.
En dépit
du fait que les espoirs fondés par les Algériens, à travers la résistance des
Aurès en 1916, de se débarrasser du colonialisme et de sa tyrannie, ne se
soient pas concrétisés, les conséquences de cette insurrection et les drames
qu'elle engendra demeurèrent gravés dans les esprits des habitants de la région,
dans les écrits des historiens et les œuvres des poètes jusqu'au déclenchement de la Révolution du premier
novembre.