A l'ouest du pays, une délégation de
représentants de l'Oranais fut constituée et se rendit à Paris en vue de
présenter les revendications des habitants de l'Ouest, opposés à la loi sur la
conscription obligatoire. Par contre, les populations de Saïda, Sebdou et
Ghazaouet ont eu recours à la méthode des requêtes et réclamations pour exprimer
leur colère et leur opposition à la politique du colonialisme tandis qu'à
Tlemcen, des dizaines de familles ont préféré émigrer à l'étranger, vers le
Moyen Orient arabe pour rejoindre les milliers d'algériens exilés au Hedjaz et
en Syrie.
Devant l'incapacité et la vanité des
méthodes pacifiques à réaliser les revendications des Algériens, ces derniers
eurent recours à la désobéissance et la rébellion en réaction à la poursuite par
les autorités coloniales de l'application effective de la loi sur la
conscription, notamment après que la décision fut prise d'accélérer la
mobilisation des jeunes algériens de la classe de 1914.
Après le déclenchement de la première
guerre mondiale, l'administration française intensifia l'opération de
mobilisation qui toucha environ 4000 jeunes à la fin du mois d'Août 1914,
lesquels bénéficièrent d'un entraînement militaire préliminaire avant d'être
envoyés sur les différents fronts en Europe.
Face à ce bouillonnement , des rumeurs se
sont répandues dans la région de Mascara selon lesquelles la France allait
procéder à la convocation des mineurs, supprimer les indemnités et recourir, en
cas de nécessité, aux malades et aux hommes âgés si les choses se compliquaient
face à l'Allemagne.
Ce furent là autant de raisons qui
poussèrent les jeunes de Ouled Sidi Dahou et des villages environnants à refuser
de se conformer aux ordres de l'administration française en s'inscrivant sur les
listes de conscription à la fin de l'année. Les autorités coloniales eurent
alors recours à la menace et au chantage. Elles arrêtèrent les chefs de village
pour contraindre les jeunes à se plier mais cette démarche eut pour effet de
mettre le feu aux poudres et conduisit à l'explosion de la situation, englobant
ainsi toute la région.
Malgré la mobilisation par la France de
troupes militaires importantes, les habitants continuèrent à refuser de livrer
leurs enfants. Le désordre se généralisa et les accrochages dans la ville de
Mohammedia en octobre 1914 se soldèrent par de nombreux morts et blessés des
deux côtés.
Les insurgés attaquèrent les fermes de
colons, les détruisant et incendiant tout ce qui représentait l'administration
coloniale. Ils attaquèrent les agents de l'administration pour se venger du rôle
qu'ils ont joué dans le recensement des jeunes mobilisables.
Après ces évènements, l'opération de
répression débuta au moyen de troupes militaires venues de tous les côtés de
l'ouest algérien. La région de Béni Chougrane fut encerclée du 5 au 20 octobre
1914. Au cours de cette période, de nombreux villages furent incendiés
condamnant les habitants à l'errance, tel Douar el Fraguig. Les habitants
tentèrent de négocier avec l'armée française mais cette dernière procéda à
l'arrestation des membres de la délégation et tout suspect fut emprisonné.
Après une répression qui a duré plusieurs
semaines, cette insurrection aboutit à l'arrestation de centaines de jeunes et
d'adultes de la région avec, à leur tête, les chefs de la rébellion. Les
personnes arrêtées furent présentées devant les juridictions d'exception
françaises et des peines diverses furent prononcées à leur encontre, allant de
la prison avec sursis à la condamnation à mort. Des sanctions furent également
prises consistant en la saisie des biens de nombreuses tribus et clans de la
région de Béni Chougrane auxquelles furent imposées des amendes exorbitantes. En
outre, de nombreux notables furent démis de leurs fonctions.
L'insurrection des Béni Chougrane s'étendit
aux alentours de la région de Mascara même après la fin de la première
rébellion. La désobéissance se poursuivit en 1915 de façon moins violente
certes, avant que Tébessa et Souk Ahras ne connaissent une situation similaire
au cours de la même année. Le nombre de jeunes déserteurs de l'armée française
continua à augmenter en dépit de toutes les mesures répressives prises par la
France pour stopper ce phénomène.